ACCRA / 22-29 février 2016

ALLOCUTION DU PRESIDENT DE LA RECOWA-CERAO

 

Monsieur le Président de la République du Ghana, Eminences les cardinaux,
Excellence Monseigneur le Nonce Apostolique Excellence Monseigneur le Président du SCEAM Excellence NNSS les Archevêques et Evêques, Honorables Invités
Révérends Pères,

Chers religieux, religieuses

Chers frères et sœurs dans la foi,

1- A mon tour, j’adresse à vous tous mes salutations fraternelles, et je vous exprime mes sincères remerciements, en général à vous tous pour votre participation à la cérémonie d’ouverture de cette deuxième Assemblée Plénière de la Conférence Episcopale Régionale de l’Afrique de l’Ouest (RECOWA- CERAO), en particulier à vous tous participants à l’assemblée, pour votre présence physique et vos contributions journalières au succès de nos travaux. Les uns et les autres, vous n’avez pas marqué de consentir des sacrifices qui ont rendu possible votre présence. Je demande au Seigneur de vous en récompenser selon les meilleurs desseins de sa Providence.

En communion avec tous les Archevêques et Evêques membres de la RECOWA-CERAO, et en leur nom, j’exprime notre respectueuse et profonde gratitude au Président de la République du Ghana et à tout le Gouvernement, pour l’accueil si généreux, qui nous a été reservé, pour tous les services qui nous ont été rendus et qui le seront durant tout notre séjour, ainsi que pour toutes les facilitations qui ont été déployées pour notre entrée dans le pays, et pour les bonnes conditions de vie et de travail, dont nous avons bénéficié et bénéficierons encore.

Je me tourne aussi vers nos frères les Archevêques et Evêques du Ghana, qui ont accepté d’accueillir notre Assemblée Plénière, ont déployé leur énergie, leur savoir-faire et leur créatitivité, pour préparer la tenue de nos assises et veiller sur leur bon déroulement. Puisse Dieu, notre Maître, qui nous a rassemblés ici, combler de ses bénédictions et de ses grâces ce pays et cette Eglise, qui nous offrent la belle hospitalité dont nous bénéficions !

2- En tant que deuxième réunion de tous les évêques de l’Afrique de l’Ouest Anglophones, Francophones et Lusophones, notre assemblée de ces 22-29 février 2016 ne peut qu’être une consolidation de la belle aventure commune, que nous avons entamée avec l’assemblée des 23-29 janvier 2012 à Yamoussoukro. Nous devons en particulier finaliser la mise en place des instances de réflexion, concertation et collaboration pastorales, comme préciser les orientations et lignes d’action, les voies et moyens qui hisseront notre instance de solidarité pastorale organique à sa vitesse de croisière, dans tout l’espace de l’Afrique de l’Ouest. Puisse notre prière quotidienne de toute la semaine nous obtenir du Maître de la Vigne, qui nous a envoyés dans ce vaste champ régional, l’ouverture de nos esprits et de nos cœurs à sa lumière et à son action, qui fécondent la réflexion commune et la concertation de tous ceux qui les accueillent en toute disponibilité !

3- Par ailleurs, dans la communion avec les fidèles du Christ d’Afrique et des îles adjacentes, et sous l’impulsion du Symposium des Conférences Episcopales d’Afrique et Madagascar (SCEAM), bien représenté par son président que nous saluons et remercions cordialement, nous avons tenu à inscrire cette assemblée plénière dans le sillage de la deuxième Assemblée spéciale pour l’Afrique du Synode des Evêques d’octobre 2009, et tout particulièrement dans les orientations de l’Exhortation post-synodale Africae Munus. C’est ainsi que nous nous sommes fixé le thème de nos assises : « La Nouvelle Evangélisation et les défis spécifiques de l’Eglise Famille de Dieu en Afrique de l’Ouest : la Réconciliation, le Développement, et la Famille ».

Nous avons demandé à deux conférenciers de bien vouloir déployer le thème, pour notre réflexion commune, en deux moments : d’abord un premier exposé sur « la Nouvelle Evangélisation : défis de Réconciliation et de Développement
», ensuite un deuxième exposé sur « la Nouvelle Evangélisation et la Famille ». Sans empiéter sur leurs riches discours théologiques et pastoraux, que nous attendons avec avidité, je me permets d’ébaucher une problématique du thème choisi par le Comité Permanent de la RECOWA-CERAO.

 

M’abstenant de revenir sur les trois domaines, dans lesquels l’Evangélisation se réalise fondamentalement, selon le N°14 de l’Exhortation post-synodale Evangelii Gaudium du Pape François, je pense que l’Evangélisation se renouvelle aussi, lorsque l’annonce de l’Evangile s’accomplit dans la prise en compte des contextes de temps et de lieu, où évoluent ceux qui annoncent et ceux qui les écoutent. Or ces contextes de temps et de lieu comportent des défis, qui sont des occasions et des appels à annoncer la Bonne Nouvelle avec pertinence. En d’autres termes, ces contextes de temps et de lieu comprennent des évènements heureux ou malheureux, des situations et des conditions heureuses ou malheureuses de plus ou moins longue durée, vécus par les personnes et leurs communautés, et qui constituent des occasions et appels à la proclamation de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ.

Pour un tel propos, j’aime à me référer à la façon de faire de Paul lors de son fameux passage à Athènes , et à sa non moins fameuse prédication à l’Aréopage, si bien marquée par le contexte de temps et de lieu.(cf Act 17.19.31). Chaque fois que l’Evangélisation s’efforce d’intégrer les réalités de contexte, nous pouvons dire que l’Evangélisation se renouvelle, qu’elle est nouvelle.

J’ose dire encore qu’elle est nouvelle en fonction de l’Evangélisateur lui-même. Pour le cas de Paul encore, nous savons combien sa proclamation de l’Evangile a été marquée par sa conversion de Juif, fervent zélateur de la Loi de Moïse, à Jésus-Christ et par Jésus-Christ. Elle a été pour lui occasion et appel à annoncer Jésus dans la spécificité du Mystère de sa Personne et de sa Mission.

Appliquées à l’Eglise Famille de Dieu en Afrique de l’Ouest, ces considérations nous amènent aux défis de la nouvelle Evangélisation annoncés dans le thème de l’assemblée, défis tenant au sujet évangélisateur, comme au contexte de temps et de lieu.

En Afrique de l’Ouest, le sujet évangélisateur est l’Eglise Famille de Dieu, selon la belle image que le premier Synode Africain a privilégiée et vulgarisée. Dans la région comme partout sur le continent, cette Eglise Famille a pour membres des hommes et des femmes pétris de la culture de leurs différents peuples, ainsi que des croyances et pratiques de la Religion Traditionnelle Africaine (RTA). Ils sont pétris en particulier de la foi en la famille et de l’attachement à la famille. Baptisés, ils sont convertis, ou mieux ils sont en chemin de conversion, à Jésus- Christ, le Révélateur de la Famille de Dieu, et qui déclarait : « Qui est ma mère et qui sont mes frères ? … Voici ma mère et mes frères. Car quiconque fait la volonté de mon Père qui est aux cieux, celui-là m’est un frère et une sœur et une mère » Mt 12,48-50.

En chemin de conversion à Jésus-Christ, ils travaillent et doivent travailler à passer de la vision de la famille traditionnelle à la vision de la famille de Jésus- Christ ; ils travaillent et doivent travailler à passer de la vie en famille traditionnelle à la vie dans la Famille de Dieu qu’est l’Eglise. Ce sont autant d’occasions et d’appels à annoncer l’Evangile de la Famille, comme aiment à dire les Papes. Pour les membres de l’Eglise Famille de Dieu en Afrique, la famille est un aréopage pour cette annonce de l’Evangile de la Famille ; un appel constant à évangéliser la famille, comme à donner à l’Eglise son visage de Famille de Dieu.

En somme, des défis pour la nouvelle Evangélisation tiennent bel et bien au sujet Evangélisateur qu’est l’Eglise Famille de Dieu en Afrique, l’Eglise Famille de Dieu en Afrique de l’Ouest.

Dés défis découlent également du contexte de temps et de lieu, comme l’ont souligné les Pères du deuxième Synode Africain durant les quatre semaines de leur réflexion commune, et comme l’a confirmé le Pape Benoit XVI dans l’Exhortation post-synodale. Avec eux, nous avons retenu les défis de la Réconciliation, de la Famille et du Développement.

La Réconciliation est une exigence pour toutes les sociétés humaines, à travers l’espace et le temps. Nous savons qu’ils sont innombrables et incessants les évènements, les situations et les conditions de vie, qui la réclament en Afrique en général, et donc en notre Afrique de l’Ouest, où le déploiement du terrorisme constitue un défi nouveau. Aussi adhérons- nous à ces paroles du début du n°20 de l’Exhortation Africae Munus : « En effet c’est la grâce de Dieu qui nous donne un cœur nouveau et qui nous réconcilie avec lui et avec les autres … En Jésus-Christ, « dans sa vie et dans son ministère, mais spécialement dans sa mort et sa résurrection, l’apôtre Paul avait vu Dieu réconcilier le monde … avec lui- même, ne tenant plus compte des fautes des hommes» (cf. 2Co 5,19 ; Rm 5,10 ; Col1 21-22).

L’apôtre avait vu Dieu réconcilier les Juifs et les Gentils avec lui-même, créer un homme nouveau à la place des deux peuples (cf. Eph 2, 15, 3,6).

Cette même action de Dieu créant un homme nouveau crée aussi, en Jésus- Christ, une Famille nouvelle, qui doit revêtir de plus en plus un visage concret dans les familles chrétiennes, les communautés chrétiennes, les diocèses des Eglises d’Afrique, et donc de notre région. Notre réflexion de la semaine nous permettra de préciser les voies et moyens de vivre et d’annoncer l’Evangile de la Famille, dans les pays de notre région.

La pauvreté – misère sévit toujours sur le continent, et s’accentue pour une bonne partie de ses populations. Aussi avons-nous décidé d’inclure le Développement dans le programme de notre réflexion, développement à concevoir et à conduire comme promotion de tout homme et de tout l’homme, selon la belle formule de l’Encyclique Populorum Progressio du Pape Paul VI, et pour toutes les catégories de personnes énumérées au chapitre II de l’Exhortation Africae Munus.

Au fil de notre réflexion, nous ne manquerons pas de reprendre conscience de l’urgence de relever les défis de la Nouvelle Evangélisation dans notre région et en Afrique, comme de la nécessité et de la fécondité de l’engagement de tous les membres de nos Eglises dans l’Evangélisation.

4- Notre Assemblée s’inscrit évidemment dans l’Année de la Réconciliation, décrétée par le SCEAM en application de l’Exhortation Africae Munus. Nous veillerons alors à ce que notre réflexion sur le défi de la Réconciliation nous amène à élaborer des orientations et des directives, qui nous aident à bien vivre cette Année de la Réconciliation, avec nos frères et sœurs catholiques d’Afrique et îles adjacentes.

En communion filiale avec le Pape François et fraternelle avec les catholiques du monde entier, nous sommes engagés dans le Jubilé extraordinaire de la Miséricorde. Les orientations et exhortations de la Bulles d’Indiction Miséricordiae Vultus ne manqueront pas d’apporter des vues enrichissantes pour notre réflexion et ses conclusions.

Puisse donc Marie, Mère de la Miséricorde, Notre-Dame de la Pentecôte et Notre-Dame d’Afrique, nous obtenir les grâces de ces deux Années de la Réconciliation et de la Miséricorde pour la fécondité de nos travaux, pour l’épanouissement toujours plus visible de la vie chrétienne dans nos Eglises, et pour l’engagement plus généreux de tous leurs membres dans la Nouvelle Evangélisation.

 

Théodore Adrien Cardinal SARR Archevêque émérite de Dakar Président de la RECOWA-CERAO